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D’ordinaire la mer cache ses coups. Elle reste volontiers obscure, Cette ombre incommensurable garde tout pour elle. Il est très rare que le mystère renonce au secret. Certes, il y a du monstre dans la catastrophe, mais en quantité inconnue. La mer est patente et secrète; elle se dérobe, elle ne tient pas à divulguer ses actions, Elle fait un naufrage, et le recouvre; l’engloutisse est sa pudeur. La vague est hypocrite; elle tue, vole, recèle, Ignore et sourit. Elle rugit, puis moutonne. 
Ici rien de pareil. Les Douvres, élevant au-dessus des flots la Durande morte, avaient un air de triomphe. On eût dit deux bras monstrueux sortant du gouffre et montrant aux tempêtes ce cadavre de navire. C’était quelque chose comme l’assassin qui se vante. 
L’horreur sacrée de l’heure s’y ajoutait. Le point du jour à une grandeur mystérieuse qui se compose d’un reste rêve et d’un commencement de pensée, A ce moment trouble, un peu de spectre flotte encore.

 

Victor Hugo " Les travailleurs de la mer " Editions d'Yves Colin